En matière successorale, la technique du démembrement de propriété permet à une personne d'anticiper la transmission de son patrimoine en donnant la nue-propriété d’un bien tout en conservant son usufruit. Le nu-propriétaire ne devenant plein propriétaire du bien transmis qu’au décès de l’usufruitier, sans avoir à régler de droits de succession.
Pour éviter qu'il y ait des abus et que la transmission de la nue-propriété ne soit réalisée que dans un but exclusivement fiscal, un bien dont la nue-propriété a été transmise à un héritier (l’usufruit étant conservé par le défunt) est, en principe, réintégré sur le plan fiscal à la succession du donateur pour sa valeur en pleine propriété.
Précision : la réintégration à l’actif successoral taxable du défunt peut venir alourdir les droits de succession que les héritiers devront régler.
Cette présomption fiscale de propriété de l’usufruitier peut néanmoins être écartée dans certains cas. La loi distingue, à ce titre, les donations réalisées par le défunt plus de 3 mois avant son décès et celles consenties moins de 3 mois avant son décès.
Ainsi, lorsque la donation a été effectuée plus de 3 mois avant le décès, la nue-propriété du bien n’a pas à être réintégrée dans l’actif successoral taxable du défunt à condition notamment qu’elle soit constatée par un acte ayant date certaine (acte authentique, acte sous seing privé...).
Mais si la donation est faite moins de 3 mois avant le décès de l’usufruitier, les héritiers doivent écarter la présomption fiscale de propriété de l’usufruitier en apportant la preuve de sa sincérité et démontrer que la donation n’a pas été réalisée dans un but exclusivement fiscal.
Dans une affaire récente, un contribuable avait donné la nue-propriété de parts de SCI à ses héritiers tout en conservant son usufruit. Le donateur est décédé 2 mois plus tard. L’administration fiscale avait alors décidé, au grand dam des héritiers, de réintégrer la valeur des parts transmises dans l’actif successoral du défunt.
La Cour de cassation a toutefois donné raison aux héritiers et ainsi écarté la présomption fiscale de propriété de l’usufruitier. Les juges ont pris en compte le fait que le décès du donateur était survenu soudainement. Le médecin traitant ainsi que des proches du défunt ayant, par ailleurs, attesté de son bon état de santé au moment de la donation. En outre, la donation qui avait été réalisée s’inscrivait dans la continuité d’une précédente donation consentie en faveur des mêmes bénéficiaires 4 ans auparavant.
21/02/2012 © Copyright SID Presse - 2012